Suspension d'un Arrêrté Préfectoral - Fédération Nationale des Gardes Particuliers Assermentés

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Pour obtenir la suspension d’un arrêté préfectoral autorisant la destruction d’une espèce protégée, il faut démontrer l’urgence
       Par arrêté du 5 septembre 2018, le préfet du Loiret a autorisé une dérogation à l'interdiction de destruction, perturbation intentionnelle, capture d'espèces animales protégées et destruction, altération, dégradation de leurs aires de repos ou sites de reproduction dans le cadre du projet de déviation de la route départementale 921 entre Jargeau et Saint-Denis de l'Hôtel, sur les communes de Jargeau, Sandillon, Darvoy, Mardié, Marcilly-en-Villette et Saint-Denis de l'Hôtel.
     Deux associations attaquent cet arrêté et en demande la suspension sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative.
     Rappelons qu’en vertu de cet article, celui qui demande la suspension d’un acte administratif doit démontrer qu’il y a urgence à ce que l’acte ne soit pas exécuté et un moyen propre en l’état de l’instruction à faire douter de la légalité de l’acte attaqué.
 
     
     Les hypothèses dans lesquelles le préfet peut accorder une dérogation à l’interdiction de détruire une espèce protégée
    " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits :
 
     1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ;
 
     2° La destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette ou l'enlèvement de végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou de toute autre forme prise par ces espèces au cours de leur cycle biologique, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat, la détention de spécimens prélevés dans le milieu naturel ;
 
    3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces ;
 
    4° La destruction, l'altération ou la dégradation des sites d'intérêt géologique, notamment les cavités souterraines naturelles ou artificielles, ainsi que le prélèvement, la destruction ou la dégradation de fossiles, minéraux et concrétions présents sur ces sites ;
 
    5° La pose de poteaux téléphoniques et de poteaux de filets paravalanches et anti-éboulement creux et non bouchés.
 
    II. - Les interdictions de détention édictées en application du 1°, du 2° ou du 4° du I ne portent pas sur les spécimens détenus régulièrement lors de l'entrée en vigueur de l'interdiction relative à l'espèce à laquelle ils appartiennent " (art. L. 411-1 du code de l’environnement).
 
   " Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées :
 
   1° La liste limitative des habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées ainsi que des sites d'intérêt géologique, y compris des types de cavités souterraines, ainsi protégés ;
 
   2° La durée et les modalités de mise en œuvre des interdictions prises en application du I de l'article L. 411-1 ;
   3° La partie du territoire sur laquelle elles s'appliquent, qui peut comprendre le domaine public maritime, les eaux intérieures la mer territoriale, la zone économique exclusive et le plateau continental ;
 
  4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle :
 
  a) Dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ;
 
  b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ;
 
  c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ;
 
  d) A des fins de recherche et d'éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ;
 
  e) Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d'une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d'un nombre limité et spécifié de certains spécimens.
 
  5° La réglementation de la recherche, de la poursuite et de l'approche, en vue de la prise de vues ou de son, et notamment de la chasse photographique des animaux de toutes espèces et les zones dans lesquelles s'applique cette réglementation, ainsi que des espèces protégées en dehors de ces zones ;
 
  6° Les règles que doivent respecter les établissements autorisés à détenir ou élever hors du milieu naturel des spécimens d'espèces mentionnés au 1° ou au 2° du I de l'article L. 411-1 à des fins de conservation et de reproduction de ces espèces ;
 
  7° Les mesures conservatoires propres à éviter l'altération, la dégradation ou la destruction des sites d'intérêt géologique mentionnés au 1° et la délivrance des autorisations exceptionnelles de prélèvement de fossiles, minéraux et concrétions à des fins scientifiques ou d'enseignement.
 
   II. - Un décret en Conseil d'Etat détermine également les conditions dans lesquelles, lorsque l'évolution des habitats d'une espèce protégée au titre de l'article L. 411-1 est de nature à compromettre le maintien dans un état de conservation favorable d'une population de cette espèce, l'autorité administrative peut :
 
  1° Délimiter des zones où il est nécessaire de maintenir ou de restaurer ces habitats ;
 
  2° Etablir, selon la procédure prévue à l'article L. 114-1 du code rural et de la pêche maritime, un programme d'actions visant à restaurer, à préserver, à gérer et à mettre en valeur de façon durable les zones définies au      1° du présent II ;
 
  3° Décider, à l'expiration d'un délai qui peut être réduit compte tenu des résultats de la mise en œuvre du programme mentionné au 2° au regard des objectifs fixés, de rendre obligatoires certaines pratiques agricoles favorables à l'espèce considérée ou à ses habitats.
  Ces pratiques peuvent bénéficier d'aides lorsqu'elles induisent des surcoûts ou des pertes de revenus lors de leur mise en œuvre " (art. L. 411-2).
 
  Il résulte des dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement qu'un projet de travaux, d'aménagement ou de construction d'une personne publique ou privée susceptible d'affecter la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leur habitat ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s'il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, tels que notamment le projet urbain dans lequel il s'inscrit, à une raison impérative d'intérêt public majeur.
  En présence d'un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées appréciées en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, que si, d'une part, il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et, d'autre part, cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.
 
   Il s'ensuit que l'intérêt de nature à justifier, au sens de l'article L. 411-2-I c du code de l'environnement, la réalisation d'un projet doit être d'une importance telle qu'il puisse être mis en balance avec l'objectif de conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvage poursuivi par la législation, justifiant ainsi qu'il y soit dérogé.
   Ce n'est qu'en présence d'un tel intérêt que les atteintes portées par le projet en cause aux espèces protégées sont prises en considération, en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, afin de vérifier s'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et si la dérogation demandée ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.
 
   Par son arrêté du 5 septembre 2018, le préfet du Loiret a dérogé à l'interdiction de destruction, perturbation intentionnelle, capture d'espèces animales protégées et destruction, altération, dégradation de leurs aires de repos ou sites de reproduction dans le cadre du projet de déviation de la route départementale 921 entre Jargeau et Saint-Denis de l'Hôtel sur les communes de Jargeau, Sandillon, Darvoy, Mardié, Marcilly-en-Villette et Saint-Denis de l'Hôtel.
    
    Les associations n’ont pas démontré qu’il y avait urgence à suspendre l’arrêté du préfet
   Pour justifier l'urgence d'une suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet du 5 septembre 2018, les associations requérantes affirment que cette dérogation est de nature à entrainer des atteintes irréversibles aux 22 espèces protégées mentionnées par l'arrêté, ainsi qu'à d'autres espèces recensées dans l'étude d'impact.
    Mais, la cour administrative n’est pas convaincue.
 
    Aucune pièce du dossier ne révèle l'existence d'atteintes à des espèces protégées.
    S'agissant plus particulièrement le Balbuzard pêcheur, sa zone d'habitat n'est pas directement impactée par le projet et une nouvelle aire d'accueil a été créée à proximité avant le démarrage des travaux d'infrastructure.
 
    En second lieu, il ressort des pièces du dossier qu'une partie des travaux susceptibles d'entrainer la destruction d'espèces, et notamment les abattages destinés à préparer les défrichements, sont achevés.
    Si les associations requérantes affirment que les travaux ont repris fin 2021 notamment dans le lit mineur d’un cours d’eau avec l'installation de batardeaux, ces travaux sont, conformément au calendrier environnemental défini pour respecter les cycles de vie de la faune, interrompus depuis la mi-mars jusqu'au mois d'août ou de septembre 2022 en fonction de l'avis des écologues.
 
    En troisième lieu, si les associations requérantes affirment que ces atteintes sont aggravées par l'absence de suivi du chantier par un écologue et un maitre d'œuvre, ceci n'est pas établi.
 
    En quatrième lieu, si les associations requérantes relèvent l'absence de mesures nécessaires à la limitation des risques d'introduction et de dispersion de trois espèces végétales exotiques envahissantes notamment par bâchage, il ressort des pièces du dossier que ce phénomène qui concerne l'ensemble du lit E... n'est pas spécifique à la zone du chantier, qu'en outre une seconde campagne de destruction du raisin d'Amérique est prévue en fonction des inspections de l'écologue, tandis que la renouée du Japon et la Jussie ont été isolées.
 
    En cinquième lieu, si les associations requérantes affirment que les barrières destinées à isoler le chantier des amphibiens et de la petite faune terrestre ne seraient pas entretenues, il ressort des pièces du dossier que ces barrières sont régulièrement vérifiées et ont été reprises en décembre 2019 pour maintenir leur étanchéité pendant la durée des travaux.
 
    Enfin, l'affirmation selon laquelle les zones sensibles ne seraient pas balisées au niveau du chantier n'est pas établie.
    Il ressort en revanche des pièces figurant au dossier que les effets du chantier sur les intérêts environnementaux sont maitrisés et les mesures environnementales prescrites respectées.
 
    Bref, les éléments invoqués par les associations requérantes ne sont pas de nature à justifier de la condition d'urgence prévue par l'article L. 521-1 du code de justice administrative.
 
(CAA Versailles 28 avril 2022, n°22VE00413).

     Robert CRAUSAZ
La F.N.G.P.A est un organisme  de formation professionnelle  enregistré DA N° 754 701 570 47 à la Préfecture Règionale de Nouvelle Aquitaine
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